Les bureaux d’Upciti à Montreuil fourmillent d’activité. De grands écrans donnent des informations en permanence sur l’état du parc de capteurs et sur la santé de l’infrastructure qui les gère. Il faut dire qu’avec plus de 2000 capteurs en activité sur plusieurs continents, cette supervision est indispensable. « Nous sommes capables de détecter un problème sur un capteur en moins de 2 minutes et il est désormais fréquent que nous soyons capables de les anticiper » nous explique Christophe Lehmann, en charge du support.
«C’est une vraie fierté de voir cette équipe de 25 personnes qui travaille à mettre en œuvre le projet» nous confie Jean-Baptiste Poljak, fondateur et dirigeant de l’entreprise. A entendre le chemin parcouru pour en arriver là, on peut aisément comprendre ce sentiment. Créee en 2017 après 2 ans de R&D, cette entreprise ressemble aux belles histoires de la Silicon Valley. Des essais dans une cave de 2m , puis des premières installations, une première embauche, des premiers locaux à Montreuil, une première levée de fonds, puis une deuxième, pour arriver aujourd’hui à une équipe de 25 personnes dans des locaux flambant neufs, « Nous avons repris des locaux Ubisoft » nous glisse Jean-Baptiste.
Pourquoi cet attachement au respect de la vie privée ?
« Nous avons dans nos sociétés actuelles un rapport à la vie privée et l’anonymat assez étrange. Il paraît évident pour tout le monde de refuser de mettre ses données de santé en ligne, mais qu’une société privée puisse lire vos mails, regarder vos photos, suivre votre activité sur Internet ne semble pourtant pas créer de tensions majeures.
Les données que nous générons sont des données dans l’espace public, et je n’ai pas envie, en tant que citoyen et père, que mon visage ou celui de mes enfants atterrissent dans une base de données sur laquelle je n’ai aucun contrôle. Et c’est pourtant bien ce qui se passe avec les scandales ClearView, ou encore les failles récentes des caméras HIKvision. C’est pour cela que la vie privée est le souci N°1 d’UPCITI et nous avons choisi de traiter ce problème en nous empêchant matériellement de capter des données personnelles. Nous aimons à dire que nos clients n’ont pas besoin de nous faire confiance. »
Mais pourtant des solutions existent pour flouter automatiquement des visages sur un flux vidéos ?
« Bien sûr, mais posez-vous la question : qui floute ? Un logiciel, qui a été développé par une société privée et qui va, avant d’opérer un floutage, avoir l’image dans une qualité parfaite. Quelle confiance avez-vous en la personne qui dirige cette société ? et si cette personne tout à fait intègre était remplacée demain, comment garantir qu’une simple mise à jour ne viendra pas modifier le comportement du logiciel ? La versatilité des systèmes d’anonymisation font qu’en réalité, il est impossible de garantir l’anonymat, et dans l’espace public, c’est un problème majeur de sécurité et de garantie des libertés »
Cela semble être un débat d’experts, que dit la loi ?
« Ce n’est pas un débat, c’est simplement le choix entre faire confiance à une entreprise privée pour se charger de données personnelles et biométriques sensibles ou tout simplement lui interdire la possibilité même de les récupérer.
La loi encadre l’usage des caméras de vidéosurveillance, mais quant à l’utilisation d’algorithmes, il n’existe rien encore. La CNIL s’est penchée sur le sujet et a sorti des recommandations très claires sur la « bonne » façon de faire de l’analyse d’images dans l’espace public et celles-ci collent en tout point à la raison d’être d’Upciti : privacy by design, frugalité des données et analyse embarquée (edge computing). La FTC Américaine s’intéresse elle aussi au sujet, ainsi que le PPC au Japon. »
On se rend vite compte de la technicité de votre solution en visitant vos bureaux, cela la rend-elle accessible uniquement aux grandes villes ?
C’est en effet un système qui tire sa complexité des barrières mises pour protéger la vie privée et de ce que nous pensons être la façon la plus saine de déployer une infrastructure data dans une ville. A savoir une solution multi cas d’usage, à faible consommation électrique et bien sûr « privacy by design ». La marche pour y arriver est très haute, mais le capteur en lui-même n’est pas coûteux, c’est là toute la force de notre solution.
Nous visons justement les petites et moyennes villes, qui ont des besoins criants de connaissance de leur territoire mais des budgets souvent limités. Pour ces villes nous avons monté une offre dédiée où elles ne paient que pour les données qu’elles utilisent. Cela permet de commencer à se familiariser avec la donnée, de tester différentes solutions de valorisation, et cela débouche quasiment tout le temps sur une souscription à de nouveaux cas d’usage pour d’autres services. Si on veut que la smart City décolle, il faut que quelqu’un prenne un risque, nous l’avons pris et notre activité ces derniers mois nous a donné raison.
Quand on me demande des références dont je suis fier, j’aime à donner la principauté de Monaco et l’île aux Moines dans le Morbihan, cela donne une idée de l’étendue de notre panel de clients.
Quelle est la suite pour UPCITI ?
Nous avons commencé avec succès à déployer notre solution en Europe, aux Etats-Unis, au Moyen-Orient et bientôt au Japon. Cela nous a permis de voir que notre modèle fonctionnait partout et ne nécessitait pas d’adaptation locale. L’année 2023 va être une phase d’expansion internationale très active, la demande est forte et cela montre aussi qu’une innovation Française, avec des valeurs fortes peut très bien s’exporter.
Pour en savoir plus :
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